
~ Laure Avilès ~

Déroulement d'une psychothérapie
“Transformer le récit d’une souffrance en une demande travaillable,
faire émerger des ressources
pour mener à bien le travail de changement”
Principes généraux

On se donne une dizaine de séances pour faire advenir un changement qui soit significatif pour la personne concernée. On vise des changements concrets, simples, modestes mais qui fassent sens, et qui soient écologiques (respectueux) pour la personne dans son environnement actuel. "Les grandes transformations sont la somme de petits changements." Il est extrêmement rare qu’il n’y ait absolument aucun résultat significatif au bout de 10 séances ; lorsque c’est le cas cependant, il est hors de question de poursuivre la thérapie car ça n’aurait pas de sens, ni pour le patient ni pour le thérapeute. En général les premiers changements sont sensibles entre la 4e et la 6e séance en moyenne : c'est la phase de "déblocage" (parfois une seule séance suffit même pour débloquer une situation, mais cela ne doit pas être un but en soi) Il est alors nécessaire de consolider ces changements lors des séances suivantes, pour les rendre pérennes : c'est la phase de consolidation. On espace les séances, pour prendre le temps d'expérimenter les nouveaux scripts, de mettre en pratique les nouvelles ressources, de mettre à l'épreuve les nouvelles stratégies. Lorsque patient et thérapeute s'accordent là-dessus, on convient conjointement de la fin de la thérapie, lorsque les choses vont suffisamment bien pour que la vie du patient continue dans de meilleures conditions.
La prise de rendez-vous

La prise de RDV peut se faire en ligne : Il vous sera demandé de préciser brièvement le motif de votre venue ; cela me permettra -entre autres choses- de vous indiquer d’emblée si d’aventure il s’agit d’un problème pour lequel je ne suis pas compétente, et de vous orienter le cas échéant vers un confrère. Cela permet également de prendre une minute pour se mettre face à soi-même et se demander déjà ce qu’on attend d’une thérapie. Il peut m’arriver de revenir vers vous, par mail ou par téléphone, pour préciser certaines choses lorsque cela me semble nécessaire. Ce sera systématique pour les demandes concernant des adolescents. Pour préciser qui est à l'origine de la prise de RDV, qui est le plus demandeur d'une psychothérapie pour cet.te adolescent.e. Parfois c'est l'ado lui-même qui se sent en souffrance et a demandé à son/ses parent/s de lui trouver "un psy". Parfois la demande émane plutôt du/des parent/s, inquiet ou épuisé ou exaspéré (souvent à juste titre) par le comportement de l'ado, et ayant fait le constat de sa propre impuissance à régler le problème, alors que ça ne peut plus durer comme ça. Dans cette situation, c'est donc le parent qui prend RDV pour son ado, celui-ci ayant plus ou moins donné son accord. Or, on ne devrait jamais prendre RDV pour quelqu’un d’autre que soi-même (conjoint, enfant, parent…) : Même si c’est tout à fait justifié de penser que cette personne devrait “voir quelqu’un” car il/elle a des problèmes à résoudre, et qu'il/elle a besoin de l'aide d'un professionnel pour cela. Même avec les meilleures intentions du monde... Il n’est pas possible de décider pour quelqu’un d’autre qu’il/elle devrait débuter une psychothérapie. Ni même de l’inciter fortement à consulter. C’est d'ailleurs souvent plutôt contre-productif et générateur de résistance au changement. Par contre, ça ne veut pas dire qu’il n’y a rien à faire : il est possible de prendre un RDV si l’on est convaincu que quelque chose doit changer. Parce que ça ne peut pas continuer comme ça. Mais on prend alors RDV pour soi-même, dans un premier temps. Même si ce n’est pas “soi-même qui a le problème” : en effet, dans ce contexte on commence par faire le point sur votre propre souffrance par rapport à la situation, et deux options s’ouvrent alors. ~ Soit c’est vous (la personne qui est demandeuse) qui commencez à changer certaines choses, notamment dans la manière d’entrer en relation avec la personne qui a le problème, et cela suffit parfois à débloquer une situation qui paraissait inextricable jusque-là. ~ Soit on trouve ensemble une stratégie pour rendre la personne qui a un problème demandeuse de changement, et plus ouverte à entamer une thérapie elle-même; thérapie dans laquelle elle sera dès lors plus disposée à s’impliquer.
La première séance

La première séance est une rencontre, mais c'est déjà une séance de travail à part entière. Le patient est invité à évoquer sa situation, et ce qu'il attend de la thérapie. Le thérapeute pose des questions, recueille des informations, afin de comprendre le mieux possible ce que vit et ce que veut le patient. C'est un dialogue qui s'installe, et se poursuivra tout au long de la thérapie, dans un contexte sécurisant où le patient doit se sentir accueilli et accepté dans sa singularité et ses valeurs. A l’issue de cette séance, après quelques minutes de pause de réflexion, il est fréquent que le thérapeute propose au patient de “faire quelque chose” jusqu’à la séance suivante. En effet, il s’agit d’une approche participative, dans laquelle le patient doit s'impliquer, et pour laquelle son entière collaboration est requise. Il peut s’agir d’observer certaines choses, ou de penser à certaines choses, ou d’écrire certaines choses, ou de faire certaines choses… Toujours en tenant compte de la demande du patient et de ses ressources pour y parvenir. Rien de ce qui sera demandé n'est inaccessible, mais le thérapeute ne peut pas savoir jusqu'où son patient est prêt à le suivre. C'est une découverte conjointe qui se produit tout au long de la thérapie.
Les séances suivantes

Lors des séances suivantes, le thérapeute commence souvent par faire le point sur ce qui a changé depuis la séance précédente. Il demandera probablement si le patient a pu faire ce qui lui avait été proposé, comment il s'y est pris pour cela, et ce que cela a entraîné. En fonction des réponses du patient, le thérapeute peut ajuster sa stratégie : quoi que le patient ait fait (ou pas), quels qu'en aient été les effets, cela donne des informations au thérapeute sur la nature du problème et la manière d'amener le patient à le résoudre. Parfois les changements sont rapidement spectaculaires. Parfois, les résistances sont importantes (tout système tend à rester à son point d'équilibre même si cet équilibre est inconfortable) et il faut procéder par étapes.
Les "tâches" (inter-séances)

Les "tâches" proposées en fin de séance, à faire jusqu'à la séance suivante, sont assez emblématiques du modèle des thérapies brèves. En effet, cette approche est participative : le patient est acteur de la résolution de son problème ou de l'amélioration de sa situation. Le but des tâches n'est cependant pas de résoudre le problème, mais de mieux comprendre son fonctionnement, pour cheminer vers la solution. Le thérapeute propose de "faire quelque chose jusqu'à la prochaine fois" : observer certaines choses, penser à certaines choses, écrire certaines choses, faire certaines choses... Les tâches sont parfois surprenantes, elles peuvent sembler parfois paradoxales, ou parfois coulent de source. Elles demandent parfois des efforts; elles amènent parfois déjà à plus de confort. Mais d'une manière générale, le thérapeute a besoin de l'entière coopération du patient, qui s'engage dans la thérapie en participant activement aux séances mais aussi en s'impliquant assiduement dans les tâches : ce n'est pas le thérapeute qui résout le problème ou améliore la situation; il crée un contexte dans lequel le patient trouve les ressources pour aller de mieux en mieux, et inscrire ces améliorations dans la durée.
La fin de la thérapie

La durée totale de la thérapie sera celle qui est nécessaire pour chacun.e. Rien de plus, rien de moins. Il est évident que certaines thérapies se poursuivent au-delà des 10 séances qu'on se fixe en début de thérapie, mais uniquement lorsque cela est utile et pertinent. Parce que le changement est en cours. Et que parfois cela prend du temps de changer. C’est tout à fait OK d’aller à son rythme. La brièveté des thérapies brèves n’est pas un prérequis, c’est simplement une conséquence de leur efficience. Mais il est important d'avoir à l'esprit dès le début de la thérapie que celle-ci aura une fin : on pourrait "être en thérapie" toute sa vie, car il y a toujours des difficultés à surmonter, toujours des choses à améliorer ; parce que c'est passionnant de mieux se connaître, mieux se comprendre... Mais la vie est faite pour être vécue, pas pour être analysée ou améliorée en permanence. La porte reste toujours ouverte, en fin de thérapie, si le problème revient, ou si un nouveau problème survient. Mais après une thérapie on est mieux armé pour faire face à de nouvelles difficultés, grâce aux nouvelles ressources, qui permettent plus d'autonomie et de souplesse.